Maquillé comme un coloriage dans un cahier à deux sous d'une crèche, elle parcourt le monde avec ses deux talons taillés comme les baguettes d'un restau chinois miteux. Elle a toujours la dalle et elle se sent toujours crade. Dix minutes après la douche Marlène a l'impression d'être un déchet non recyclable prêt pour l'incinérateur.
Elle a la peau du yaourt qu'on retrouve posé sur la table en se reveillant le lendemain matin. Ses cheveux sont plus batailleurs que des faucons ricain tandis que ses mains ont pris pour exemple les cratères de la lune.
A part ça, Marlène va pas trop mal. Marlène se marre bien à consulter les offres d'emploi. Pas la force d'être hotesse, fusil à un coups de merde : un sourire par jour forcé. Pas la force d'être caissière , mais déjà fait quand même.
Super, super . Marlène doit aller à un repas de famille.
Cela fait chier Marlène, parce que y'a encore quelqu'un à la table qui va lui demander (en connaissant la réponse d'avance) : ET TOI ! Marlène, qu'est-ce que tu fais en ce moment ?
Et Marlène aura l'air bien conne devant tous ces gens bien insérés, qui n'aiment pas les glandeurs. Marlène pourra bien dire qu'elle est une artiste et qu'elle veut sortir un disque, toute seule avec sa guitare cryptique , mais les gens vont encore bien rigoler. Puis là, elle va baisser la tête, se concentrer sur la bouffe : se sera des coquilles saint jacques à la beschamelle. Bordel Marlène n'a jamais su comment l'écrire, mais bref, des choses de la mer qui baignent dans un liquide frelaté.
On dirait des bouchons qui nagent dans de l'essence siphonnée . Mais Marlène est courtoise, ça lui arrive, et sa famille c'est sa seule sortie.