Silence - Les ecrits de Silence-Cowbloghttp://silence.cowblog.frSun, 15 Mar 2015 16:57:42 +0100180Temps étudiantSun, 15 Mar 2015 16:57:00 +0100Sun, 15 Mar 2015 16:57:00 +0100http://silence.cowblog.fr/temps-etudiant-3272375.htmlSilenceDans cette gestion du temps étudiant, à la fac d'histoire, de philo, d'arts plastiques, de sciences, ils avaient trouvé une structure inédite qui n'existait que dans les universités publiques à l'ancienne, c'est à dire enseignant un savoir théorique et non professionnel. Avec du recul. Dans ces institutions, la cervelle travaille autant que les hormones. C'est le meilleur des temps de l'existence dans la société moderne. Or, de plus en plus, ce mode de vie recule. On critique les cours d'amphi, certains profs font l'appel comme au collège, on souhaite supprimer le théorique pour laisser place au professionnel et à l'opérationnel. Au loin, les tribuns universitaires et les étudiants brillants se perdent dans l'envie de cadrage, de sélectivité, de cours plus « concrets ». Tuer l'académie et l'idée antique du savoir au profit d'une faculté de marchands de tapis. Il faut penser au travail ! À votre avenir ! Il faut faire un « truc qui marche » , à la mode, pour briller en société.

Les disciplines trop intellectuelles sont bien entendu excluent de ce mode de pensée. On les réserve aux imbéciles et à ceux qui ne comprennent rien à la mondialisation. Le moderne est ici synonyme de régression vers la pensée autoritaire archaïque.

Pourtant encore, dans quelques singulières bâtisses, des professeurs continuent à enseigner les vertus de la Grande Réflexion. Ils interrogent le monde, insultent parfois les médias et les structures et , un instant, font briller les yeux de leur auditoire.

Les étudiants, les années passant, voient leurs amis entrer bon gré malgré dans le monde du travail. La pression sociale les pousse à terminer leurs cursus et à se diriger vers des pensées pécuniaires. Un jour on vit soudain dans son appart' seul en oubliant les spéculations de l'Agora. Alors on vote avec son portefeuille, son narcissisme et finalement par aliénation. Pion supplémentaire parmi les masses abrutis. La semaine boulot, le week-end : les mêmes tentatives de loisirs toujours décevantes et ainsi de suite jusqu'à une retraire qui recule de plus en plus. Les voyages virtuels et les promenades avec les vieux compères deviennent des « événements facebook ». 

]]>
Extrait "Les exaltés"Sun, 04 Jan 2015 03:42:00 +0100Sun, 04 Jan 2015 03:42:00 +0100http://silence.cowblog.fr/extrait-les-exaltes-3271055.htmlSilence
 
http://silence.cowblog.fr/images/JackDaniels-copie-1.jpg 
Chez Franck

 Al sonna longuement chez Franck par pur esprit puéril. C'est sa femme, Eve, qui vint lui ouvrir la porte en tablier. Elle le conduisit dans le salon où Franck roulait un énorme "Splif".

"Salut mec, tu veux une bière ?" Dit Franck tout en roulant.

"Oh ouais

-Alors qu'est ce que tu viens foutre ici un dimanche ?

-Me disait est-ce que tu occupes ton temps comme tu le voudrais ?

-Oula cette question, bah, ça dépend des taffs. Mais avec Eve j'pense qu'on s'en sort pour faire des trucs. Puis le jardin, les petites périodes de chômage, c'est un choix.

-T'as pas l'impression de quand même faire toujours la même chose ?

-Putain j'capte pas mec. On t'as jamais raconté mais bon avec Eve, on fait parfois des choses qui sortent de l'ordinaire.
-Comment ça ?

-J'ai jamais osé en parler mais comme tu t'intéresses à moi et ma vie, j'vais te dire: on se fait des plans.

-Des trucs de cul ? T'es échangiste ?"

Franck marqua une pause pour allumer son joint. Il eut un air satisfait à la première bouffée puis repris , avec l'accent du fumeur, la parole:

"Pas de l'échangisme, on a des copains ou des copines du côté d'Eve avec qui on baise régulièrement, que ça soit des gens seuls ou pas, on reçoit et on se déplace. Mais derrière, t'as aussi un aspect social tu vois. On discute un peu, on voit comment vivent les gens, où ils bossent puis on baise. C'est sympa parce qu'on a rencontré des gens très différents avec parfois des opinions de merde. Pourtant ces gens ouvraient leur porte en grand lorsque le moment sexe arrivait. J'ai même bourlingué à Londres comme ça.

-Putain tu m'en as jamais parlé. Je capte pas pourquoi...

-Bah, j'ai pas l'intention de faire ce genre de trucs avec toi donc bon, ça reste à part tu vois

-A part ? Mais tu parles de ça comme une bouffée d'air. Et puis pourquoi pas moi ?

-T'es un vieux pote, ça foutrait en l'air des choses je pense. Fin, j'te vois pas avec moi et Eve à poil. On aurait l'air cons.

-Donc, le principe, c'est d'avoir ce cercle de cul en dehors de celui normal ?

-Exact mec, t'as capté.

-Tu te sens en concurrence avec moi Franck ?

-Quoi ?

-J'acpte pas pourquoi j'pourrais pas baiser avec vous sauf si tu te sens en concurrence avec moi."

Franck s'assombrit soudain tandis que Eve vint s'asseoir près de lui. Elle avait pris un intérêt pour la tournure des choses car, au fond, elle ne voyait pas d'inconvénients à faire l'amour avec des "gens proches". Plus fort que cela, sa bisexualité la poussait à tenter de le faire avec ses vieilles copines de Fac.

"Mec, c'est comme ça, je bloque un peu là dessus, j'me vois pas avec toi au pieux.

-Pourtant pour regarder des films de cul...

-Bon merde. T'es venu pour baiser ? Ca te prends comme ça ? Tu regrettes d'avoir rien fait avec Miss Nutella ?

-Oh... Non je m'interroge sur ta pratique, sur le fait que ça soit ce que tu affectionnes le plus dans ta vie, à priori.

-C'est trop bon de faire ça Al, un sacré bol d'air. Mais j'peux pas le faire comme ça, ça s'organise tu vois."

Eve soupira alors un peu, puis glissa un sourire entendu à son compagnon. Elle se caressa langoureusement les cheveux puis finit par s'exprimer, limpide:

"Ce n'est pas à part pour moi Al. Franck et moi avons inclus cette sexualité car elle correspond à notre manière de vivre. On fait nos légumes, nos mi-temps et on partage une sexualité multiple.

-Mais du coups, Eve, pour toi faire ça c'est un peu "normal" ?

-Oui voilà, c'est pas plus choquant que ça. On reçoit et on bouge comme on irait au bar par exemple.

-Mouais, mais du coups, vous rentrez dans une sorte de norme là. Puis à priori c'est pas si évident pour Franck.

-Et alors Al ? On te l'as déjà dit, cette vie simple , "normée" comme tu dis, on ne souhaite pas la changer".

 Elle semblait sûre d'elle, heureuse. Vivre dans son taudis avec un ex Metalleux et organiser des sorties "dimanche cul " c'était son rêve de gamine qui se réalisait. Mais Al ne la trouvait pas pour autant hypersexualisée ou dans la séduction constante. Eve semblait juste aérienne, tranquille. C'est la première fois qu'il la vit s'exprimer avec tant de morgue, elle qui semblait rester en retrait la plupart du temps menait en réalité le ménage. 

 Al demanda du Calva à son pote avant de repartir. Sur le trajet, il eut une pensée assez troublée: et si, finalement, Franck était coincé auprès de sa femme? Elle lui faisait partager son paradis et lui restait enfermé à l'intérieur. Il avait fini par fermer sa gueule de Penseur de la Musique pour se consacrer à sa femme. Elle de lui une sorte de héros moderne de la sexualité et du potager. Pas une seule fois il n'avait parlé de la Musique comme une façon d'exister autrement. Franck était effacé par l'ombre d'une femme puissante.

 En repensant à la tenue et aux gestes d'Eve ce soir là, Al eut une érection. C'était peut-être pas si mal d'être un prêtre d'Isis au quotidien. On pouvait se reporter à sa femme si le problème de l'existence se posait. Elle remplaçait alors tout et devenait la seule sphère d'influence. Une féminité royale qui, sous ses vétements décontractés de quasi clow, dominait complétement l'âme de son meilleur pote.

Lorsqu'ils ouvrit sa porte pour rentrer chez lui pour de bon, Al se dit :

"Oh merde est pas de bon conseil putain, j'pensais qu'il serait avec une nana qui se dandine en concert. Une qui va voir du théâtre et des musées mais qui passe surtout ses soirées avec un verre à faire la dingue. Une fille moulée dans son T-short Jack Daniel's avec des lèvres rouges et des cheveux teintés. Une qui laisse des photos limites sur facebook et qui parle avec émotion de la série viking et d'obscurs groupes de black métal. Le genre de nana rock'n'roll un peu bronzée par la sueur qu'elle dépense à se dorer la pillule devant les spots des concerts". 

 Il mit fin à sa pensée avec un soupir. Après tout, Franck était avec elle car il devait être heureux comme ça. Enfin pas vraiment, à priori, mais elle voulait bien de lui, elle. Contrairement à ces "canons de beauté version Franck" qui se contentaient de se foutre de sa gueule en soirée, Eve l'avait invité à partager sa conception de la vie. Finalement Franck avait été entièrement absorbé par sa femme. Sans doute grognon au départ, il partageait désormais avec elle sa version du bonheur.

Al barra mentalement la ligne Franck dans son repertoire mental: Aliéné lui aussi. 

Il irait donc voir sa phobie : son ex.

 
]]>
Restaurant JaponaisFri, 19 Dec 2014 00:27:00 +0100Fri, 19 Dec 2014 00:27:00 +0100http://silence.cowblog.fr/restaurant-japonais-3270727.htmlSilence Le serveur m'observait d'un air étrange, comme si je venais d'ailleurs. Soit : j'étais seul parmi les odeurs de ce restaurant Japonais. Seul et prenant de ces airs pensifs à la manière d'un Rodin douteux. Mon regard errait ça et là parmi les murs et les décorations de l'endroit, cherchant à fixer quelques éléments d'intérêt, sans succès.

 

 Peu à peu, les silhouettes flouées des clients entraient à pas feutrés. Ceux-ci semblaient ralentir un instant dans leur empressement, comme si l'endroit fut un quelconque sanctuaire. Enfin, les silhouettes devinrent formes et visages et l'attroupement successif finit par s'installer. Des discussions, lentement émanèrent. Je tentais d'en capter quelques bribes, saisissant quelques expressions ridicules de la société :

 

"I'm surprised, tu aimes bien le Japonais" Dit une trentenaire blonde qui devait probablement sentir le parfum bon marché à des lieux à la ronde.

 

Devant moi, un couple de cinquantenaire parlaient design et entreprise. Lui, vieux costume vert d'un goût douteux, lunettes passées, crâne dégarni, avec une expression de sérénité du type qui ne craint pas pour son boulot. Elle , blonde du genre "chic à la moderne" avec quelques manières amusantes et une façon personnalisée de tenir ses baguettes.

 

Tout ce petit monde n'était pourtant pas soumis à un espèce de ravissement extatique, oui car j'étais bien là, moi aussi, avec mon carnet, en les regardant du coin de l'œil. Tandis que certains me remarquaient et semblaient détester me voir peindre ainsi l'endroit d'un peu de sentiment de lassitude.

 

Les serveurs ne souriaient jamais, et parfois regardaient ce que vous faisiez. Si vous leur lanciez une invitation amicale à un regard autre que celui condescendant qu'ils adoptaient, ils n'y répondaient pas. Seule la serveuse avait constamment le sourire aux lèvres.

 

 

 En réalité, je me décevais moi même de ma présence en ces lieux. Seule la perception du goût faisait pénétrer en un autre monde. Du moins en une infime essence, dans la délicate sensation agréable du palais. Les visages des clients rappelaient cependant sans cesse que nous n'étions qu'en France, dans la ville de Lille, dans le département du nord, au fameux restaurant Akira...

 

 Malgré tout l'exotisme que chacun recherchait, il n'y avait là que de la poudre aux yeux . Le personnel était Chinois, et seule le cuisinier, formé au Japon, avait le mérite d'apporter un peu de vérité dans ce rêve d'ailleurs gastronomique.

 ]]>
Alors ça roule ?Mon, 25 Nov 2013 02:21:00 +0100Mon, 25 Nov 2013 02:21:00 +0100http://silence.cowblog.fr/alors-ca-roule-3255861.htmlSilenceAlors ça roule ?

 
  Oh ben , faut que j'vous dise, j'ai un sacré cliché rêverie qui me colle . Il me colle au cul putain ! Ce gros connard me lèche allègrement l'anus. Je suis pourtant à 100 km avec mon s'mi, j'suis déjà un danger public, mais ce mec , sérieux !

 Oh putain ouais voilà, plaque polonaise. Je m'en doutais. Connard. Pour la peine je vais me foutre sur la voie de gauche et doubler un pote. Oh ouais tu imagines pas la jouissance que c'est de se mettre sur la voie de gauche avec un camion. Tous les mecs derrière en bagnole ils angoissent à mort, ils se mettent à foutre leur warning, à se serrer les fesses. 

  Dans ton retro , tu peux voir les mecs en audi avoir des grosses sueurs parce qu'ils sont coincés à 90 sur l'autoroute. Puis finalement tu te rabats, le classique p'tit appel de phare et hop. Je parcours le monde des autoroutes de l'Europe à une vitesse pourrie, j'écoute de la musique de dingue à longueur de temps mais j'peux pas accélérer au moment de la double pédale et des riffs ultra grandiloquents. J'suis là sous la pluie, en Suisse, sous la neige et dans les accidents. Je suis je suis... un chauffeur poids lourds !

 Mais sans déconner, faut voir la vie qu'on mène. T'imagines bouffer la chiasse des airs de repos très régulièrement ? Oh ouais t'es ptet un mec qui s'achète des plats préparés , mais toi t'as bien plus le choix que moi. Oh y'a les restaus routiers, mais ça s'fait rare putain. Fut-un temps avec Gegé , on s'amenait tous avec nos néons et on bouffait comme des princes chez Eva mais elle est partie en retraite maintenant chier'.

 Nous on a vu l'arrivée des Radios de merde passer de la pub' et des conneries à longueur de temps, celle des radars, des Gps, de la circulation de plus en plus bondée et du ferroutage. J'aurai du bosser à la Sncf, j'aurai pu me toucher la nouille peinard. Mais eux ils restent sur des putain de rails. Ils peuvent même pas déconner.

 Moi ? Je suis le témoin de la merde . Les sociologues à côté, c'est vraiment des p'tites bites. T'as les connards qui partent en vacance, les enfoirés qui vont au taff le matin et que tu retrouves le soir, les mecs qui vont à la plage, les groupes de gens du cirque, les gitans, les camions poubelles. Regarde moi ça, c'est pas la vie tout ce bordel sérieux ? C'est pas la vie putain ?!

 J'en ai vu des gens aller s'acheter des clopes au Luxembourg. J'ai vu des milliers de manière de pisser différentes, et les ustensiles qui vont avec, plus ou moins par inadvertance.

  T'es psy ? Tu veux capter ton patient direct ? Ben tu montes en bagnole avec. Déjà la bagnole en soit, comment elle est et comment elle est entretenue va représenter le mec. Ensuite t'auras la marque, t'auras le prix. Puis tu vas rentrer dans la caisse et tu trouveras les Cds, s'il bouffe des bonbons (et t'en propose) , s'il aspire la caisse et tout. T'auras ptet éventuellement un chien à la con là ou un sapin de merde qui traîne la depuis 5 ans. 
Tu verras si le mec il fume ou pas. Et ça c'est à l'arrêt hein, à l'arrêt. Après, quand le mec commence à conduire (ou la nana on s'en branle : putain merde, j'ai pas mis de truc sexistes dans mon texte), c'est déjà l'analyse complète.

  Enfin bon merde. Cet embouteillage se termine. On repassera pour l'analyse détaillée des comportements: démerdez vous putain.
 
 
]]>
Il bouffeMon, 07 Oct 2013 01:31:00 +0200Mon, 07 Oct 2013 01:31:00 +0200http://silence.cowblog.fr/il-bouffe-3252164.htmlSilenceIl bouffe 

http://silence.cowblog.fr/images/sandwichdegouliannt.jpg


 
 Votre serviteur est , à ce moment précis, attablé à quelques restaurants d'une chaîne ou l'on sert de la nourriture médiocre aux chalands. Il est crânement adossé à quelques chaises d'un bois aggloméré et se plaît à une lecture, Walden que décidément il ne parvient pas à terminer. 

 Il attend un train, c'est de ces instants d'angoisse ou l'on doit lever le nez toutes les cinq minutes pour vérifier que celui-ci n'est pas entré en gare. On a l'impression d'attendre un entretien ou un rencard et on essaie de se plonger dans quelques activités de lecture pour s'en sortir plutôt que de rester planté pendant des heures devant le panneau d'affichage.

  Et c'est là que surgit la bête. Environ un mètre quatre vingt dix , la grosse barbe, le t-shirt d'un quelconque groupe de metal et l'allure pantouflarde. C'est l'anglo-saxon type de ceux qui vous renverse la bière en festival, vous marche sur les pieds et tombent sur votre tente à 7 heures du mat'. Du sang bovin plein les veines, il s'amène fièrement et s'assied lourdement non loin de moi, son plateau rempli de bouffe industrielle.

 Le bougre il est seul, mais il semble des milliers. Son sac est énorme, d'une couleur fluo délavée et on se demande ce qu'il peut bien y mettre au vu de son style vestimentaire minimaliste. Certainement pas une trousse de toilette en tous cas. 

 Je l'imaginais entrain de transporter un porc , ou un immense morceau de barbak. 

 Je passe à une autre page, vérifie l'heure du train et ... 

Une énorme forteresse sonore se dresse soudain devant moi. Le mec mastique. Ses mains velues dévorent les pauvres morceaux de bouffe indus' . Il fait cela comme un ogre , comme saturne qui se goinfre de ses propres enfants. Je ne peux pas lever la tête pour le regarder mais je peux sentir sa présence sordide. Il me serait impossible de le virer et partir serait mal vécu par l'insulaire , il penserait sans doute que les français sont un peu trop délicats ou mauvais avec les britanniques. 

 Je me retrouve coincé, je fais semblant de lire mais rien ne souhaite rentrer dans ma petite cervelle. Je prie pour que cela cesse, mais son plateau est terriblement rempli. Je peux percevoir le paysage alimentaire qu'il explore: sa barbe de viking est parfois traversée de quelques explosions de jus tandis que ses grosses lèvres se pincent et se contorsionnent pour avaler tout ce qu'il leur amène. 

 Ah, quel homme, un vrai bien viril ! Un révolté et un soldat du métal mais pourtant et sans aucun doute un individu qui doit souffrir qu'on puisse lui mettre une énorme étiquette sur le dos.

Je m'arrêtais un instant, pensif : et si le Valhalla était rempli de ce genre de mecs ? Imaginez les, tous attablés à un banquet avec leurs grosses barbes pleines de gras et leurs t-shirts de hard rock ! Ils seraient tous fans de skyrim et ils auraient tous joués un Nordique maniant la hache. Odin s'amènerait là-bas et succomberait directement d'une crise cardiaque sonore.

Après Wagner, l'armée de roastbeefs amis de l'eucharistie industrielle et de la substentation des gares. Mais mais ! C'est que ce terrible supplice s'arrêtait, finalement.

Notre ami se mit à se lever grassement, hissa son sac moche sur son dos et s'en alla comme il était venu : la démarche du païen converti au christianisme puis devenu un prosaïque anglican. Il retournait chez la reine mère dans un drakkar made in france . Oh et évidemment, il n'avait pas remis son plateau et laissait de son passage un désastre pictural détonant.

 Mais enfin, que voulez-vous, mon train à moi arriverait bientôt. Et je me débarasserai définitivement de cette image. 



 
 
]]>
Tirer la chasseFri, 13 Sep 2013 00:08:00 +0200Fri, 13 Sep 2013 00:08:00 +0200http://silence.cowblog.fr/tirer-la-chasse-3250349.htmlSilence

Jour 6  

Tirer la chasse

http://silence.cowblog.fr/images/ortiesgivres.jpg

 

Nettoyer est une chose qui obsède et qui donne lieu à des joies et une sorte de puissance singulière. Putain, j'savais pas ça en faisant ce métier à la con mais parfois j'éprouve une jouissance à nettoyer la chiasse des autres. Comme le truc d'exploser les furoncles de son prochain, on m'avait raconté que c’était un sentiment qui s'apparentait  à la recherche d'une jouissance et d'une domination.

  Cela doit expliquer pourquoi les toubibs se mettent parfois à déconner et qu'on en voit plein adhérer aux sectes. Les mecs, à force de guérir les conneries de microbes, ils se prennent pour des genres de sauveurs et ils ont des pensées qui vont de l’erectile au divin , flippant. 

 J'vois mon gros jet d'eau vider toute cette merde pour faire resplendir le carrelage des chiottes bien blanc et bien brillant. Je transforme ça en une chose lisse, froide et sans couleur, je fais le vide et ça me fait du bien dans ma tête de con.

 Chez moi ça m'obsède. J'peux plus tolérer le lyrisme de mon chiotte ou les tâches sur mes assiettes. Et les rares fois ou je sors de ma merde pour voir de la famille je peux pas m'empêcher de vouloir tout recurrer .

  Et pourtant, j'ai toujours détesté les obsessionnels, ces cons dogmatiques. De ceux qui ne prennent pas en compte le contexte pour juger d'une chose, d'une copie, d'une pensée. Et pourtant je faisais désormais plus ou moins parti de cette tribu.

   Mon vocabulaire s'est transformé : nettoyer, astiquer, nickel, propre, bien pur, bien blanc , bien net, bien froid et bien brillant, bien strict et bien droit. Et moi dans tous ça ? Mon appart" était propre, plus rococo, plus rangé , mais le bordel y régnait incontestablement et suintait discrètement. Le baroque revenait à la charge comme les chevaliers errants. N'y avait-il pas chose plus belle et romantique que toute cette discipline et cette étique dédiée au final à l'errance , à la liberté, à la pensée et aux voyages ? Formé dans un moule mais loin des territoires moraux surgissait l'image fin de siècle de l'homme des barricades bien mis.


 J'adorais, de fait ce concept masqué. Les gens vantaient mon décor d'appart' témoin, ils s'extasiaient devant tel ou tel objet ou étaient stupéfaits de la propreté du lieu et de comment le travail m'avait changé. J'étais désormais homme accompli, je cotisais pour ma retraite, j'achetais du PQ triple épaisseur. Mais derrière tout ça, il n'y avait que la solitude, dans les armoires ça sentait le moisi et dans le frigo ça puait la cuisine du déserteur.


J'arrivais pas à me fixer avec les gens. Soient qu'ils admiraient la discipline , soient le côté anarchique et chaotique de mon existence riz + thon + mayo. J’étais juste un putain de technicien de surface, ça faisait tout de suite chier et je sentais la déception quand j'annonçais ça aux nanas que j'essayais de brancher.


 Mais au final, je trônais dans ce nouvel intérieur comme un dictateur observant les rangs alignés de ses petits soldats. L'air maussade, la gueule en travers, à la fois fier mais ne démontrant aucun bonheur. Derrière la rigueur  la poussière et les orties. 


 

]]>
Jour 5 Casser la croûteSun, 25 Aug 2013 03:01:00 +0200Sun, 25 Aug 2013 03:01:00 +0200http://silence.cowblog.fr/jour-5-casser-la-croute-3248862.htmlSilence
Jour 5

Casser la croûte 

 
 Connards ! Vous pensiez que je ne cherchais pas ? Vous pensiez sérieusement que j'étais qu'un déchet de merde ? Qu'il fallait LEGIFERER pour me foutre au boulot, feignant comme j'étais ?  Sans déconner ! J'suis sûr que vous aviez pensé à ça. 

Ptet que vous êtes de ceux qui pensent que le travail rend libre ? Hein ?? Comme les pires crétins d'une certaine guerre mondiale de merde? Ouais ? Parce que bon "mussolini et tonton ils disaient pas que des conneries" , proto-cons , australopithèques de la pensée. La servitude volontaire , idée retranscrite dès le XVI par la boétie, un pote au père Montaigne. 

 Bref, j'ai trouvé du boulot. Alors c'est un truc qu'on peut qualifier de boulot de merde cool. C'est un concept particulier : il s'agit de faire une activité de merde mais dans un environnement correct. Dans mon cas je suis le prince de la pisse, du vomis et autres. 

  Qu'est-ce que j'fais ? Bah je récure les chiottes et je nettoie des salles de concerts. J'fais tous les styles musicaux en gros, je suis devenu le musicologue des vomis, le maestro de la chiasse et le roi de la pop de la pisse.

  Je pars bosser vers 5 heures du mat' et je m'amène dans des salles qui sentent encore la sueur à plein nez mais aussi le parfum bon marché et les notes de musiques spectrales. J'prends toujours la programmation avant d'aller taffer parce que mon boulot m'permet de savoir comment est la salle après Charles Aznavour , Skynni Puppy ou Pink Floyd. 

 Je suis le hippie qui jette sa canette à la poubelle, le mec qui s'élance vers l'horizon avec son cigare le dernier jour des festivals de musique. Je suis le camion benne qui vide la merde du hellfest , je suis le machin étrange qu'on balance dans les chiottes sèches des rassemblements écolos.

 J'ai désormais chez moi une cinquantaine de gobelets non lavés de plusieurs groupes super connus. J'ai des extraits de bave et de bières qui ont vibré sur un monde de chants et de pensées différentes, et j'ai même ceux de certains meeting politiques . 

  Et là vous êtes entrain de vous marrer, de vous dire "merde il est devenu un mec banal avec un boulot". Ouais je suis l'empereur des dejections après l'impact des sentiments humains concentrés. Ouais, et en faisant ce que je fais, j'ai le temps de penser et de réflechir sur le monde et l'ensemble des individus. Toutes ces étoiles, ces "stars" finissent par aller aux chiottes, ils partagent tous cette condition humaine et il faut quelqu'un pour nettoyer toute cette merde. 

Plus ils sont populaires et plus j'ai du boulot. Au plus ça marche, au plus la merde bouche tous les pores de la salle de concert. Ouais et alors ? Trop commercial qu'ils disaient ? Mouais faut voir. 

Je rentre chez moi creuvé et j'fais plus du tout d'escapades nocturnes. Le soir j'bouffe du fromage blanc, j'me fais une branlette, j'lis le journal local et j'vais dormir. Je suis aliené, mais sans pression sociale. Et le Week-end ? J'suis toujours tout seul mais maintenant je suis utile à la société, mais ... J'me sens encore plus vide que lorsque j'étais au chômage. 

J'en ai parlé autour de moi, peu ont trouvé des solutions. Certains font des moutards, d'autres se torchent la gueule, d'autres se contentent de regarder la TV et certains sont heureux dans ce modèle.

Mais on est quand même, pour la majorité d'entre nous, tous dans une belle merde.

Va falloir que je trouve comment utiliser mon boulot autrement que physiquement. 

 
]]>
Interlude 2Mon, 19 Aug 2013 02:00:00 +0200Mon, 19 Aug 2013 02:00:00 +0200http://silence.cowblog.fr/interlude-2-3248394.htmlSilencehttp://silence.cowblog.fr/images/craquelure.jpg



Interlude II

Miroir

 
  Elle est rentrée avec un sacré mal de bide , puis Marlène s'est foutu à poil pour sauter dans un bain bien chaud. La radio diffusait de la daube avec un son nasillard et fort désagréable. Marlène se lavait avec une délicatesse antique, ouais comme une foutue Cléopâtre du XXI ème siècle dans toute la misère d'un minable appart' metropolitain. 

  Elle sentait le savon sur sa peau de colombe défraichie comme une libération. Les petites bulles jouaient les Robespierre sur son derme, c'était la terreur de la crasse ouais. Elle faisait ça comme un acte symbolique qui ressemblait à celui d'un rite religieux. Pour Marlène prendre son bain c'était se laver de toutes les conneries qu'elle avait dû supporter et de toutes celles qu'elle avait prononcées.

 Quoique à ce repas, Marlène avait fermé sa grande gueule. A force on finit par se lasser et on laisse les gens parler. Mais c'est une putain de fatalité , parce que c'est le moment ou on lâche prise sur le monde, ou on se barre dans un univers mental verrouillé.

  Marlène dans son bain c'était Bouddha. Au lieu d'assumer son rôle de prince, elle se barrait dans une montagne miteuse et quittait ses responsabilités en inventant la religion du renoncement.

 Renoncer ? Oui et se laisser aller tranquillement à la délicatesse des tranquilités.

 Marlène pourtant devrait sortir du bain, et affronter son foutu miroir. Oh putain qu'elle avait changé ! Qu'elle avait grossi , et ses traits avaient vieillis et commencés à devenir des fins petits papyrus. 

  C'est comme une belle feuille sèche . Lorsqu'on la regarde de loin on la trouve séduisante, lorsqu'on s'approche on remarque qu'elle se craquèle. Si on attends encore un peu et qu'on ose la toucher elle s'éparpille comme un vieux papillon qui fut le jouet d'un chat.

 Elle resta immobile pour se coiffer, se rectifier , et gribouiller sa physionomie. Marlène se faisait une p'tite effigie instagram  avant de sortir.

  Elle prendrait un autre bain là bas, un truc différent. Pas des bulles mais des notes d'ivresse et de musicalité qui viendraient caresser sa nuque. La nana semi droguée qui chatouillerait la piste de danse comme un vieillard jouant avec une barbe gigantesque. Ouais elle ferait cette généralité de fermer les yeux et d'être juste seule avec son tabac et sa vodka. 

  Mais le matin , Marlène devrait encore une fois monter les foutues marche , sortir de cet autre bain et se réveiller à la lueur agressive du jour. Elle verrait autre chose que son image en reflet, mais se serait sans doute un truc à peu près similaire. Un truc comme une âme perdue, une belle âme solitaire mais heureuse. Une créature impossible et inexistante, puisque sans le bonheur des relations humaines mais qui, de toutes façons, avait décidé de se retirer du monde.


 
]]>
Charon jour 4Thu, 18 Jul 2013 04:59:00 +0200Thu, 18 Jul 2013 04:59:00 +0200http://silence.cowblog.fr/charon-jour-4-3245924.htmlSilenceJ'tente de m'imposer un putain de bon rythme, mais "les perturbations sans importance car non créatives du quotidien" me font un peu chier parfois. Mais je vous rassure y'avait pas que des perturbations non créatrices. 

Charon jour 4 

http://silence.cowblog.fr/images/popolemploi.jpg

 
 Voilà c'est le lendemain des bonnes résolutions du kebab. J'me suis levé avec des cernes énormes parce que j'ai foutu mon réveil à 8 heures alors que j'suis resté eveillé à boire du coca et à regarder les nuages passer à travers le velux installé dans mon clic clac toujours en mode lit. 

   Ce matin c'est le jour du TRAVAIL . Je ne suis plus un chômeur, mais un jeune homme en "recherche ACTIVE d'emploi". Sans déconner ! J'me suis inscrit chez popol emploi. J'ai reçu un super dossier couleur avec un type qui fait un putain de sourire , et suis rentré dans une agence avec des brochures où tout le monde se marre.

 Un type à l'entrée par contre, ne se marrait pas. Il insultait copieusement la pauvre employée parce qu'il ne comprenait pas où il fallait mettre la croix sur les papiers du popol emploi. C'était vraiment pas ce qu'on m'avait décrit sur la brochure.

Bon une fois rentré chez moi, fallait que je fasse un dossier , fallait foutre mes diplômes et ce que je voulais faire. J'allais remplir la case "carrière professionnelle". Direct carrière, ça me laissait rêveur.

Pourtant j'ai eu l'air con le jour de l'entretien, j'avais rien marqué et la nana a louché sur mon parcours : ouais ouais deux ans de philo, un an de droit, un an d'histoire, un peu d'art et culture et pour finir une dernière année en économie. Jamais rien obtenu d'autre que ces validations, j'avais même fait le con pour qu'ils impriment le truc ou il est marqué DEUG , bref le diplôme qui existait avant la réforme. 

Elle ne savait pas quoi faire de moi, parce que j'avais fait des trucs complétements différents sans forcément de sens logique et pas du tout "professionalisant". Elle aurait pu me parler de tas de trucs, me motiver, me montrer des brochures qui tuent, mais nan.

 Elle m'a sorti deux putain de papiers pour postuler à des trucs de télévendeurs. J'suis rentré chez moi et j'ai fait une lettre de motivation, c'est clair que j'avais toujours rêvé de faire ce taff, j'avais des érections incontrôlables rien que d'y penser. J'appréciais aussi tout particulièrement que chaque coup de fil soit enregistré et qu'un retard de deux minutes soit limite jugé comme une faute lourde. 

Mais ce secteur recrutait et pas les autres. FAUT FAIRE DES EFFORTS . Alors j'ai envoyé mes foutus candidatures. Et j'ai pas eu de réponses. J'ai rebouffé du riz au thon mayo, suis allé dans une bibliothèque pour lire le magazine littéraire et j'ai passé un mois à glander devant des films de plus en plus exotiques à force d'en voir.


Le mois suivant j'reçois des offres : Televendeur, oh puis y'avait un truc cool que j'avais trouvé sur le net : caissier dans un bar tabac.

Putain le mec demandait deux ans d'expériences pour vendre des clopes, d'être classe (dans un bar tabac pmu s'il vous plaît) , d'être dynamique et tout. J'ai donc fait une lettre de motivation pour le bar tabac...


 Ce que j'aurai voulu y mettre c'était ça : OH vous cher homme qui par votre tradition maintenait cet établissement merveilleux , je me joins à votre entreprise de grandeur pour faire renaître cette glorieuse icône qu'est le bar tabac. J'irai par delà les carrelages collants et les rideaux moisis servir de la Jupi dès 9 heure du matin aux quelques poivrots. Je ferai la conversation aux vieilles belles et j'alpaguerai les gamins qui veulent de la vodka. J'porterai un tablier et un costume classe mais toujours dégueulasse. On rigolerait avec Dédé qui fait son loto le mardi et Jean marie qui s'amène pour nous montrer les photos de sa moto.


 Endroit avec des gens vrais, une vieille odeur de tabac qui rendrait dépressif le père Evin et tous les nouveaux croisés anti-tabac. J'irai vendre des cigarettes électroniques parce qu'on est un bar tabac moderne, j'fumerai quelques cigares tout secs de notre fausse cave et j'irai conquérir le monde avec mes fûts . 


J'ai envoyé la lettre, j'ai pas eu de réponse.


Ah merde, j'étais pourtant MOTIVE pour le poste. J'avais l'air des cons de la brochure ! C'est raté pour la communication à la con et l'état d'esprit positif.


Bon , ben , va falloir encore chercher. C'est que ça commence à prendre du temps ces conneries, au moins deux heures par jour. 







 
]]>
Charon -Jour 3-Fri, 28 Jun 2013 03:14:00 +0200Fri, 28 Jun 2013 03:14:00 +0200http://silence.cowblog.fr/charon-jour-3-3244102.htmlSilence(Un point sur la temporalité : je fais des trucs au jour le jour mais en gros la temporalité est clairement foireuse pour le moment. Cela reste du texte blogué et non retravaillé. Mais bon, au moins, ça souligne une idée d'evolution d'un jour un jusqu'à un jour 365 à la rigueur avec les interludes marléniens interconnectés . Un truc cool se serait d'ajouter des saisons, du climat, du bordel, des élections, et tout et tout, mais faudra que l'auteur bosse dur et retravaille chaque jour dans le détail. Et l'auteur les 3/4 du temps il parle tout seul !)
 
http://silence.cowblog.fr/images/kebab.jpg
 
 
Troisième jour 
 
  Aujourd'hui , comme j'avais prévu, j'suis encore sorti de chez moi. Putain c'était dur parce que quand t'es tout seul t'as l'air con à chaque endroit ou tu peux aller. Quand tu vas au bar, t'es tout seul avec ton verre et tu vois tous les gens qui sont entrain de discuter du taf, de politique, de leurs vies de merdes , de leurs gosses. T'as les gens qui sont en rencard et qui galèrent, t'as ceux qui lisent un livre ou le journal avec un air sérieux et philosophe du style "aha je suis l'intellectuel du bar" et t'en as d'autres qui glandent seuls comme des cons à leurs tables. 

  J'fais parti de ce dernier type, je suis le con qui mate les autres, le voyeur à deux balles qui a l'impression que tout le monde se moque de lui parce qu'il n'a rien d'autre à faire que d'attendre que sa bouffe arrive. J'ai honte dans ces moments là, d'être esseulé  dans un endroit réputé social. J'ai envie de m'allumer une clope, mais comme on ne peut plus fumer dans les bars, j'peux pas et du coups je m'emmerde encore plus.

 Je pourrais sortir avec ma clope, mais un connard verrait que je suis un gentil petit mec tout seul. Il ferait son sociable deux minutes rien que pour m'en taxer une. Tu sais, c'est comme les mecs et les nanas qui me parlaient jamais à la fac, mais qui venaient mendier mes cours parce que j'avais l'air d'être "à la page". En fait non, mes cours étaient à chier parce que je passais la moitié de mon temps à dessiner des symboles bizzares sur mes cahiers. Ouais , je milite pour la restauration des cours de rhétorique pour les profs, carrément, et putain au moins deux heures par semaine.

 Ouais et donc je me retrouve dans un Kebab. Chez moi je bouffe des fruits et légumes, pas cinq par jour, et pas tous les jours, mais j'essaie de faire un peu gaffe avec le riz, thon et mayo. Mais comme je suis paradoxal (souviens toi premier jour ) ben parfois je vais dans des temples de la malbouffe. Mais j'aime pas trop macdo et kfc au final, mes trucs préférés c'est les kebab , j'trouve ça hilarant et aussi social, parce que le mec du kebab il se démerde tout seul pour faire tourner son bouge.

Le kebab c'est la gargotte moderne. C'est le genre d'endroit ou tu vas quand t'es un aventurier niveau un dans un jeu de rôle. Tu fais pas trop gaffe à l'hygiène, les clients craignent et sont pas franchement des aristos et le patron porte souvent la moustache de Saddam Hussein. Mais bon, tant pis , parce que c'est quand même bon putain.

 Ma vie, c'est un énorme Kebab. Il tourne lentement toute la journée et t'as des mouches qui viennent de temps à autre l'emmerder. Au début il est prometteur, bien beau et gras, il sue à mort la viande et il et capiteux comme le plus merveilleux des parfums. Ensuite un mec vient le charcuter à la truelle électrique et c'est le début des emmerdes : Le kebab perd son enfance et commence à se décomposer. Il finit en casses-dalles divers et variés avec ou sans crudités, cuisinés à diverses sauces.

Après dans ses vieux jours, il est digéré puis rebalancé dans le réseau. "De poussière il revient à la poussière". De la merde il revient à la merde, sous une autre forme qu'un gros tas de viande tournant . 


On m'a servi , après cette courte pause hypnotique. J'ai tenté de parler au patron , parce qu'il était kurde, mais il parlait pas français. J'lui ai donc parlé en anglais, mais il m'a répondu "no politic". Putain fait chier, les kurdes c'est une discussion géopolitique d'arte de 4 heures et demi assurée tellement c'est un peuple empêtré entre plein de pays différents, mais bon non, tant pis. Je suis revenu à mon assiette et j'ai ouvert mes oreilles pour écouter les gens discuter. Et là j'ai eu un choc : j'étais un vieux, parce que je captais plus les modes et les expressions, j'étais déjà dépassé et je l'avais même pas remarqué.

Bordel, y'avait des gens avec des fringues dégueulasses et des grosses lunettes, c"était la méga mode. J'ai appris qu'ils se faisaient appeler les "hipster". Ouais pas mal , la culture du mauvais goût et du kitsch. Mais qu'on vienne pas me dire que c'est un truc anticonformiste hein, pas de ces conneries là ! Les gens utilisaient des expressions comme "boloss" et puis d'autres machins dont je me souviens pas. Ils avaient tous des "smartphones" (dou you spike the franglish ! ? ) , et le mot "kiffer" était désormais complétement passé de mode, c'était déjà un truc de vieux parce que les bourgeois l'utilisait . Ouais, j'ai entendu des gens dire "kiffer" et pas dans un kebab, dans un resto' japonais, et pas un resto de merde hein, un bon resto japonais.

Donc je me suis dit que voilà, maintenant, j'étais plus un jeune. Je pouvais plus aller draguer à la fac en prêtant mes cours, je pouvais plus aller aux Ags des manifs étudiantes , j'pouvais plus discuter de la prof de littérature pendant la récré du lycée. J'étais cuit, parce que j'étais entre les deux, et que maintenant normalement fallait être un adulte.

"Il est temps d'arrêter les conneries et de se mettre au boulot !". "Il faut faire des EFFORTS" . "Y va falloir bosser MAINTENANT" .

Sans déconner ? En tous cas, cette sortie m'avait appris un truc. Et j'allais faire quelquechose de super positif : chercher un boulot.

Je vous sens déjà entrain de vous marrer. Ouais je vais écrire , les jours suivants, sur mes entretiens, sur les boîtes d'intérim, sur la merde que c'est de chercher un boulot même si on est super motivé et tout. 


Déjà vu, déjà fait. Mais faut le faire. Si Alfred de musset avait cherché du boulot et l'avait raconté, on aurait bien rigolé. On n'insiste pas assez là dessus. 

Bon , j'aurai pu déformer la réalité pour m'attirer une autre population de lecteur. J'aurai pu écrire sur les grandes écoles et comment c'est trop dur d'être un type de l'élite. Comme la vie est compliquée et comme j'en ai sué pour arriver à un poste à responsabilité que j'ai bien mérité. Comment j'ai réussi ma vie parce que j'ai une voiture allemande, une femme pas mal et une grosse baraque surequipée. Mais en fait non.

Et c'est pas anticonformiste. Les histoires de glandeurs ça court les rues mais les histories de golden boys aussi. J'vous vois arriver hein, j'suis malin !




 
]]>